Reproductibilité de la mesure de turbidité des eaux résiduaires urbaines

RUBAN ; LAURENT ; MABILAIS ; FRANCE

Type de document
RAPPORT DE RECHERCHE
Langue
francais
Auteur
RUBAN ; LAURENT ; MABILAIS ; FRANCE
Résumé / Abstract
1 INTRODUCTION L’emploi de la mesure de turbidité pour estimer en continu les flux de polluants particulaires, notamment les matières en suspension, se répand non seulement parmi les organismes de recherche, mais aussi parmi les services opérationnels. La mise en oeuvre de cette méthode de mesure a progressé, tant en ce qui concerne la turbidimétrie même, que l’utilisation des relations avec les concentrations de polluants pour estimer les flux polluants, comme l’a bien montré la journée SHF-ASTEE organisée en mars 2010 et intitulée « Turbidimétrie en réseaux d’assainissement ». Cependant la plupart des études pour estimer la précision de la mesure sont de type intra-laboratoire, c'est-à-dire qu’un utilisateur donné étudie la précision de ses mesures avec son matériel (turbidimètres, étalons) et ses méthodes, qui ne sont pas toujours bien adaptées à cette estimation. Notamment la méthode courante d’estimation des incertitudes d’une courbe d’étalonnage ne tient pas compte de l’incertitude sur l’étalon (spécification) ni de sa variation avec la valeur mesurée. C’est pourquoi il nous a semblé intéressant de faire une comparaison inter-laboratoires entre le GEMCEA et l’IFSTTAR, afin de confronter les résultats de mesure obtenus avec différents étalons et différents matériels fonctionnant suivant les 2 principes de mesure normalisés (atténuation et néphélométrie), d’abord sur des échantillons de matériaux étalon (formazine et kieselguhr) dont on maîtrise les caractéristiques, ainsi que des échantillons d’eaux résiduaires. 2 CONCLUSIONS Les conclusions que l’on peut tirer des résultats de ce rapport sont synthétisées suivant les différents points ci-dessous : * Incertitudes sur les étalons de formazine Ne disposant pas d’élément sur les incertitudes des suspensions mères de formazine (étalon normalisé) fabriquées au laboratoire, on a procédé par comparaison avec une suspension mère commerciale : spécification 2% en NTU (Nephelometric Turbidity Unit), ce qui signifie que la spécification n’est donnée que pour la néphélométrie. On a effectué une étude de reproductibilité (comparaison des turbidités avec un même appareil entre 2 gammes étalon issues de ces 2 types de suspensions mères) et une étude de justesse (comparaison des turbidités de chacune de ces 2 gammes avec les valeurs théoriques), les écarts étant comparés aux incertitudes calculées avec la spécification de 2% en néphélométrie et atténuation. En néphélométrie, les écarts de reproductibilité sont compris dans les intervalles de confiance à 95%, et les écarts de justesse ne montrent pas de différence entre la suspension laboratoire et la commerciale. En atténuation, les écarts de justesse de chacune des 2 gammes par rapport aux valeurs nominales sont compris dans l’intervalle de confiance d’étalonnage basé sur la spécification de 2%. Cependant l’écart de reproductibilité dépasse dans un rapport de 1 à 2 dans 63% des cas l’intervalle de confiance basé sur cette même spécification. Malgré cette divergence et en l’absence d’élément précis sur la spécification en atténuation pour la suspension commerciale, on retiendra donc 2% comme spécification pour cette suspension ainsi que pour la suspension laboratoire aussi bien en atténuation qu’en néphélométrie. * Contribution relative des différentes sources d’incertitudes à l’incertitude de mesure Les 3 sources d’incertitudes sont les erreurs sur les étalons, celles sur la répétabilité (dispersion des résultats à court terme dans des conditions de mesure identiques) ainsi que celles sur les paramètres de la courbe d’étalonnage (le degré du polynôme est choisi de façon à négliger les erreurs systématiques de modèle). L’erreur totale de mesure en unités étalon peut être caractérisée par sa variance (carré de l’écart type Stotx), égale à la somme de la variance des erreurs sur la répétabilité Srepetx^2 et de celle sur la courbe d’étalonnage Setalx^2. L’influence de ces dernières sur l’incertitude de mesure s’exprime donc par le rapport de leur variance respective sur celle de l’erreur totale. On constate que pour les turbidimètres autres que les Mobrey en atténuation, les erreurs de répétabilité sont négligeables devant celles d’étalonnage (≤ 1%). Les erreurs d’étalonnage dépendant elles-mêmes de celles sur la répétabilité et de celles sur les étalons, ce sont donc finalement ces dernières qui sont prépondérantes dans l’erreur totale de mesure. Pour les Mobrey en atténuation, l’influence de la répétabilité varie entre 1% dans le haut de la gamme et 41% pour les turbidités basses (100 FAU) du fait de la résolution limitée de l’affichage (10 unités). Cependant cette influence sur l’accroissement de l’incertitude de mesure est compensée par une diminution du coefficient multiplicatif de Student t(95%, etal) pour obtenir l’incertitude relative I95x au niveau de confiance de 95% : 4.30 à partir de 400 FAU contre de l’ordre de 2.5 pour 100 FAU. Pour les autres turbidimètres, les valeurs plus faibles du coefficient multiplicatif sont dues à un nombre de degrés de liberté etal (= nombre de points d’étalonnage moins degré du polynôme moins 1) plus élevé. * Reproductibilité intra-modèle des mesures de turbidité La reproductibilité intra-modèle de turbidimètres a été étudiée à partir de 4 couples d’appareils en atténuation ainsi qu’un couple en néphélométrie, sur 2 gammes d’échantillons de formazine, 2 gammes d’échantillons de kieselguhr à 6 niveaux chacune, ainsi que sur 6 échantillons d’eaux résiduaires de temps sec (50 à 320 FAU, équivalant à environ 30 à 180 FNU). Les écarts obtenus sur les 3 matériaux sont analogues : - en atténuation ils varient en moyenne de 13% pour 100 FAU (maxi 22%) à moins de 5% à partir de 400 FAU (maxi 8%) ; - en néphélométrie (1 seul exemple): moyenne la plupart du temps < 7%, avec maxi à 16% à 50 et 9% à 100 FNU. Ces écarts sont la plupart du temps compris dans les intervalles de confiance à 95% de l’incertitude de mesure. Cette dernière est donc cohérente avec les résultats expérimentaux. * Reproductibilité inter-modèles des mesures de turbidité La reproductibilité inter-modèles des mesures de turbidité a été étudiée à partir de 6 couples d’appareils en atténuation et 5 couples en néphélométrie, sur les mêmes échantillons que ci-dessus. En atténuation, les écarts sont un peu plus élevés pour les eaux résiduaires que pour la formazine et le kieselguhr. Ils sont tous compris dans les intervalles de confiance à 95% pour la formazine, mais les dépassent jusqu’à +109% dans 15% (11/72) des cas pour le kieselguhr et jusqu’à +75% dans 35% (12/36) des cas pour les eaux résiduaires, surtout sur la portion de gamme 150-350FAU. Le fait que les écarts soient compris dans les intervalles de confiance pour la formazine et pas pour les autres matériaux peut être interprété comme une possible sous-estimation des erreurs de répétabilité pour le kieselguhr et les eaux résiduaires. Ces matériaux sont en effet plus difficiles à homogénéiser que la formazine. En néphélométrie, les écarts en eaux résiduaires sont plus élevés que pour la formazine, mais moins que pour le kieselguhr (pour lequel ils sont généralement supérieurs à 20%). Pour les eaux résiduaires, on constate que par rapport à l’atténuation, à part le niveau le plus bas pour lequel ces écarts sont inférieurs, pour tous les autres ils sont supérieurs, et n’ont pas tendance à diminuer comme pour l’atténuation. De même, au contraire de l’atténuation, ces écarts sont la plupart du temps largement supérieurs (jusqu’à 7 fois) aux intervalles de confiance. La raison est que certains constructeurs font appel, en complément de la néphélométrie à 90°, à une mesure en rétro-diffusion. Cette mesure permet d’étendre la gamme que l’on peut mesurer en néphélométrie (la norme NF EN ISO 7027 traite de la mesure en néphélométrie jusqu’à 40 FNU et de celle en atténuation jusqu’à 4000 FAU). Mais la façon dont cette rétrodiffusion intervient (ou non, le Mobrey LS ne semble pas en comporter) variant d’un constructeur à l’autre, rend difficile la reproductibilité inter-modèles. On ne sait pas dans quelle mesure et jusqu’à quelle valeur la mesure est en « pure » néphélométrie. Dans notre cas, la non reproductibilité a peut être été accentuée par l’utilisation du kieselguhr comme étalon secondaire. Une façon de déterminer la gamme et le degré de « pure » néphélométrie est d’ailleurs de faire un double étalonnage à la formazine et au kieselguhr, ces 2 matériaux réagissant d’une manière différente à la diffusion à 90° et à celle à 135° par exemple. On peut aussi, à la place du kieselguhr, utiliser des dilutions d’échantillons d’eaux résiduaires. Une autre façon d’exprimer la moins bonne reproductibilité inter-modèles de la néphélométrie est de remarquer que les écarts inter-modèles sur eaux résiduaires sont environ 2 fois plus élevés qu’en intra-modèle pour l’atténuation alors qu’ils sont plus de 2 à 3 fois plus élevés pour la néphélométrie. * Méthode d’étalonnage et d’estimation des incertitudes La norme NF EN ISO 7027 (2000) recommande d’utiliser pour l’étalonnage au moins 5 niveaux de turbidité plus le zéro. Cette recommandation se place dans l’hypothèse où la courbe d’étalonnage est une droite. Or dans le cas des appareils testés, la courbe d’étalonnage va jusqu’au polynôme de degré 3, ce qui diminue d’autant le nombre de degrés de liberté  (nombre de niveaux d’étalonnage moins le degré du polynôme moins 1) et augmente l’incertitude finale. Pour rester dans l’esprit de la norme, il faut donc au moins rajouter le nombre de niveaux pour obtenir un nombre de degrés de liberté égal à celui de la droite (4 = 6 – 1 – 1). L’incertitude totale diminue ainsi dans un rapport de 1.3 quand le nombre de points passe de 6 à 7 pour un polynôme de degré 2, et dans un rapport de 2.2 quand il passe de 6 à 8 pour un polynôme de degré 3. Les écarts intra- et inter-modèles mesurés pour la formazine sont cohérents avec les incertitudes déterminées avec la méthode de Deming. Mais bien qu’ils le soient également pour le kieselguhr et les eaux résiduaires en intra-modèle, on constate en inter-modèles les dépassements indiqués ci-dessus pour ces 2 matériaux, ce qui peut donc être interprété comme une possible sous-estimation de leurs erreurs de répétabilité. Une étude complémentaire pour préciser la répétabilité notamment sur eaux résiduaires serait souhaitable, mais les dépassements en inter-modèles étant limités, on peut considérer comme correcte cette estimation des incertitudes. On ne peut d’ailleurs écarter l’éventualité d’autres sources de sous-estimation des incertitudes comme celle des suspensions mère de formazine notamment en atténuation, ainsi que le caractère systématique de certaines erreurs sur les étalons (répercussion sur les suspensions filles de celle sur la suspension mère, conversion des unités kieselguhr en unités formazine). Ce caractère systématique qui n’est d’ailleurs pas pris en compte dans la plupart des méthodes, peut l’être par la méthode de Monte Carlo., RAPPORT DE RECHERCHE FINAL

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